Quelle essence peut mieux que le noyer symboliser en Pays Loudunais l’injustice des hommes envers l’arbre ?
Le temps de la prospérité
Après avoir tout donné, tout enrichi, du propriétaire terrien jusqu’au menuisier en passant par le scieur de Beuxes et d’ailleurs, après avoir offert sa générosité dans tant d’huileries artisanales et avoir livré à la gastronomie loudunaise ses plus belles lettres (pain saucé, pois fricassés, alize à la poutie, vin de noix…), le noyer roi végétal de la campagne, s’en est allé, humilié, balayé, mutilé.
Mais diable que la mémoire est courte !
Arbre de mémoire justement que ce noyer commun, Juglans Regia, qui eut l’honneur de borner les propriétés.
Sa valeur fut telle que la marine anglaise vint chercher en loudunais ses plus belles crosses de fusil. Les terres d’aubues du loudunais sont ses terres de prédilection.
On y trouve des noyers ”noirs” (en fait des vieux sujets de Juglans Régia dit noyer commun ou noyer blanc) au bois exceptionnel. Un vrai trésor.
Le temps du déclin
L’exploitation fut totale, illimitée sans jamais qu’on usât de la sagesse primordiale pour pérenniser cette richesse : la plantation. Des gels exceptionnels comme pendant l’hiver 39 furent fatals à des milliers d’entre eux.
Les objectifs à court terme prévalant sur la réflexion à long terme l’image du noyer en prit un sérieux coup. Car l’arbre qui ”mange” la terre c’est lui. Celui sous lequel il ne fait pas bon s’endormir en été, c’est encore lui. On ne prend même plus le temps d’échalouper ses délicieuses noix parfois chiches.Vraiment c’en était trop.
Le Temps du Renouveau ?
Les remembrements, s’ils ne sont plus ce qu’ils étaient, continuent malgré tout à anéantir les derniers noyers du pays. Car ne nous leurrons pas.
On ne verra plus sa silhouette imposante au milieu des champs de blé. Mais tout de même l’espoir est là. Peut-être a-t-il pour nom l’huilerie des Roches à Insay qui fait revivre la tradition de la noix, ou encore Arbrissel qui en a déjà fait planter plus de 200 dans le cadre de l’Odyssée Verte 2000.
Mais le plus bel espoir a peut-être pour nom Remembrement. L’exemple de la Commune de Curçay, se réservant les pointes ou ”abeurgeons” difficilement cultivables et plantant plus de 100 noyers dans le cadre du réaménagement foncier est peut-être l’exemple le plus significatif des temps nouveaux. Le noyer n’a pas dit son dernier mot.
V. A.
Où trouver des noyers remarquables ?
– Parc de la Mairie de La Grimaudière
– Hameau du Noyer noir à Curçay s/Dive
– Noyer noir à Velors (Commune de Loudun)
– Logis de Haute Porte à Prinçay
– Allées de noyers à Lantray (Les Trois-Moutiers) et bourg de Ranton
Bon à savoir contre les préjugés
En Loudunais on a coutume de penser qu’il y a les noyers noirs et les autres, de moindre qualité.
Erreur, tous les noyers du Pays sont des noyers blancs (Juglans Regia).
Les ”noirs” sont en fait de vieux sujets venus sur de bonnes terres d’aubues, donc au bois foncé, avec même parfois des veinages violets très réputés.
Le vrai noyer noir (Juglans Regia) est très rare dans la région. On en connaît seulement un sujet remarquable à Velors. Son bois et sa noix ne valent d’ailleurs pas ceux du Noyer blanc.
Il sert simplement de porte-greffe au noyer blanc, ce qui permet d’implanter ces derniers dans les terrains humides ou mal drainés.
Paru dans la « Feuille Arbrissel » N°05
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